caravane des enfants 2021
Contribution d'un professionnel de l'Essonne sur l'intérêt d'un groupe éthique
De l’intérêt d’un espace « éthique » pour aborder certains thèmes
Recrutée pour un poste de direction d’un SESSD en octobre 2006, j’ai rapidement été invitée à une première rencontre sur l’initiative de la délégation APF de l’Essonne, pour constituer un groupe de parole autour de l’éthique. J’ai informé l’ensemble de l’équipe sur cette initiative, la psychologue du service était la seule intéressée. Nous y sommes donc allées deux fois ensemble, ensuite son emploi du temps n’a plus permis sa présence.
Je venais d’arriver et l’APF m’a séduite par son offre plurielle de rencontres. Enfin une association qui ne demande pas aux professionnels de terrain de rester dans leur tour d’ivoire. Il semblait autorisé de « construire ensemble ».
Mes motivations étaient de plusieurs ordres :
M’étant initiée à la philosophie en passant une maîtrise plus particulièrement adressée aux secteurs santé social, c’était pour moi, l’occasion de renouer avec ce travail de pensée dans un autre cadre.
Directrice c’est une fonction qui exige de prendre un peu de distance, un peu de hauteur. Ce groupe de travail m’offre un espace d’échange très riche, où je n’oublie pas ma fonction mais ne suis pas dans ce rapport professionnel avec les participants.
Très vite une souffrance des élus de la délégation s’est exprimée et un petit noyau s’est constitué en soutien. Effectivement, la directrice de la délégation a lancé cette initiative mais elle s’est vite absentée, en arrêt maladie. De gros conflits que je n’ai pas bien saisis ont éclaté, j’ai simplement pu mesurer la souffrance des élus qui participaient à ce groupe. Il fallait tenir, donner quelques réponses institutionnelles, partager. Avec l’aide des animateurs nous avons tenté d’apaiser les blessures en offrant une écoute empathique bien qu’elle émane de professionnels.
Cela a pris du temps mais nous avons pu aborder deux thèmes importants :
Le concept de sollicitude avec ce qu’il comporte de représentations tant du point de vue des parents que des professionnels.
La sexualité, les représentations des uns et des autres, adultes en situation de handicap célibataire ou en couple, parents d’enfants handicapés, jeunes ou adultes, professionnels.
J’ai rarement vécu une telle authenticité dans les échanges. Chacun a pu dire son point de vue mais aussi ses représentations quelques fois totalement erronées. J’en suis sortie plus déterminée que jamais à écouter les demandes au lieu de penser pour le bien des personnes.
Pour chacun des thèmes nous avons eu des échanges documentés et élaborés.
Cette expérience m’apporte plusieurs choses :
- Elle me rappelle l’humilité nécessaire à notre mission d’accompagnement
- Elle me rappelle que ce qui motive mon choix professionnel : la rencontre de l’autre
- Elle m’offre un espace de réflexion
- Elle me surprend, réveille ma curiosité
- Elle m’oblige à élargir mon cadre de référence
- Elle me rappelle que l’APF est aussi une association militante organisée de façon démocratique
- Elle me rappelle que nous avons encore du travail ensemble
- Elle me rappelle que la façon de dire est quelques fois aussi importante que ce que l’on dit, qu’il est important de reformuler et de s’assurer d’être compris
- Elle me rappelle que la gestion du quotidien d’un service ne doit pas m’empêcher de penser à demain
- Elle me rappelle que les enfants deviendront des adultes
- Elle me rappelle que le travail du service doit prendre son sens dans un parcours de vie et que cette vie n’est pas celle du service
- Elle me rappelle que je fais partie d’une organisation et qu’il est important d’entretenir des relations régulières avec mes collègues
- Elle me rappelle que je ne suis pas seule et que je peux trouver des appuis
- Elle me rappelle que les espoirs des enfants ne se réaliseront que dans une société qui aura évolué
- Elle me rappelle à quel point une organisation collective peut être violente en réponse au désir singulier
- Elle me rappelle que l’homme est pluriel, que nous sommes tous différents
- Elle me rappelle que la construction se fait au rythme du plus lent si on ne veut pas laisser quelqu’un au bord de la route
Malika Redaouia, directrice du SESSD APF d'Evry - Contribution validée par le groupe éthique du 91.