ESAT : statut des travailleurs d’ESAT

La CJUE ( La Cour de Justice de l’Union Européenne) a rendu le 26 mars 2015 sa décision suite au renvoi préjudicielle de la Cour de cassation relatif au statut de travailleur au sens communautaire des travailleurs d’ESAT. Les conséquences qui en seront tirées ne sont ni connues ni claires toutefois d’ores et déjà l’APF passe à l’action.

En 2013, la Cour de cassation saisit la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) d’une question préjudicielle portant sur l’interprétation de la notion de «travailleur» au sens de la directive
2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil, du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail ainsi que de l’article 31 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.


La première chambre de la CJUE a rendu son arrêt le 26/03/2015 et décidé que : « La notion de «travailleur», au sens de l’article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil, du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail et de l’article 31, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, doit être interprétée en ce sens qu’elle peut englober une personne admise dans un centre d’aide par le travail, tel que celui en cause au principal. »


La CJUE renvoie au juge national la responsabilité de « vérifier si les prestations effectivement accomplies par l’intéressé sont susceptibles d’être considérées comme relevant normalement du marché de l’emploi. À cette fin, peuvent être pris en compte non seulement le statut et les pratiques du CAT en cause au principal en tant qu’établissement d’accueil ainsi que les différents aspects de la finalité de son programme d’aide sociale mais aussi la nature et les modalités d’exécution des prestations. »


1) Sur la procédure : Prenant acte de l’éclairage apporté par la décision de la CJUE sur la question préjudicielle, la Cour de Cassation -qui avait sursis à statuer- devrait probablement suivre cette interprétation et casser le jugement du tribunal d’Instance. La Cour de cassation renverra alors la décision sur le fond vers une juridiction de renvoi à laquelle il appartiendra d’en tirer les conséquences, notamment en vérifiant si les prestations effectivement accomplies par l’intéressé sont susceptibles d’être considérées comme relevant normalement du marché de l’emploi. A ce jour, cet agenda judiciaire n’est pas connu.

2) Sur le fond : Cette décision (qui traite d’un cas d’espèce portant sur le droit au congé d’un travailleur de CAT dans un établissement précis intervenu avant la loi de 2005 qui permis depuis de reconnaitre aux travailleurs d’ESAT un droit aux congés similaire à ceux des salariés) pourrait emporter des conséquences difficilement mesurables à l’heure actuelle.


En tout état de cause, la reconnaissance du statut de travailleur au sens communautaire, si elle intervient, ne vaut pas nécessairement reconnaissance du statut de salarié. Plusieurs pistes sont dès
lors envisageables : statut de travailleur qui pourrait le cas échéant être assimilé au statut de salarié compte tenu des caractéristiques invoquées qui, en France, ressemblent à ceux du salariat ; statut sui
generis de travailleur d’ESAT au même titre qu’il existe un statut propre aux stagiaires ou aux apprentis notamment ; pas d’octroi du statut de travailleur.


Cependant dans le cadre de la mise en conformité de la France avec les principes et directives de l’Union Européenne1, il apparait vraisemblable qu’une révision de la palette des droits actuellement ouverts aux travailleurs d’ESAT intervienne.Dès lors et compte tenu des enjeux et de l’importance de ce sujet qui concerne plus de 160.000 personnes en situation de handicap en France, les principales associations représentatives des personnes en situation de handicap et de leur famille et les organisations représentatives du secteur (Unapei, Fegapei, Andicat, Fehap, Gepso, Mutualité française, Cnape et APF) se sont réunies le 4/5/2015 dans l’objectif de partager leurs analyses et de déterminer des modalités d’actions concertées.

Au regard du temps judiciaire, qui est souvent un temps long, nous avons décidé de mettre en place un groupe de travail interassociatif qui se réunira dès septembre et sera chargé de remettre un livrable pour la fin d’année 2015. Ce groupe aura vraisemblablement à travailler les
hypothèses et à formuler notamment des propositions d’évolution du droit.

La Croix Rouge et L’Adapt seront invités à s’associer à ces travaux. Cette démarche proactive nous permettra d’avancer de concert en direction des pouvoirs publics.


L’APF a également établi des contacts sur le sujet avec la DGCS. Des échanges ont débuté sur ce sujet entre la DGCS, la DGT (Direction générale du travail), le SGAE (Secrétariat général des affaires
européennes) et le cabinet Neuville. La mobilisation de notre secteur sur la détermination d’une volonté commune s’avère dès lors d’autant plus indispensable.

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