La possibilité de prendre des mesures de substitution à l’accessibilité du cadre bâti neuf a été adoptée, hier, à l’Assemblée nationale dans la proposition de loi Paul Blanc, et ce, malgré de vifs débats ! L’Association des Paralysés de France (APF), qui y a assisté, condamne vivement l’adoption de cet article et des amendements complémentaires, qui ouvrent une brèche dans la possibilité de déroger à l’accessibilité sur le neuf !
Jusqu’à preuve du contraire, les impossibilités techniques sur des constructions neuves n’existent pas ! De plus, tout porte à croire que le gouvernement et une majorité de parlementaires ignorent que la France a ratifiée la convention ONU relative aux droits des personnes handicapées et que celle-ci prévoit la conception universelle !
Les personnes en situation de handicap n’acceptent plus d’être traitées comme une « soushumanité » et de voir leur liberté fondamentale de circuler entravée chaque jour !
* Acculturation des architectes et brouillage politique scandaleux de la part du gouvernement !
L’Assemblée nationale a donc confirmé l’amendement voté par le Sénat : la possibilité de demander des mesures de substitution pour des bâtiments neufs, lorsque le maître d’ouvrage apporte la preuve de l’impossibilité du fait de l’implantation du bâtiment, de l’activité qui y est exercée ou de sa destination.
Pour l’APF, les impossibilités techniques mises en avant par les architectes illustrent seulement le manque de formation et le défaut de créativité de la majorité d’entre eux ! La problématique d’acculturation des architectes sur les principes d’accessibilité et de conception universelle est très profonde mais pourtant ignorée des débats ! De plus la Banque Mondiale a démontré qu’il n’existait aucun surcoût à l’accessibilité des bâtiments neufs.
Par ailleurs, le gouvernement joue sur les mots avec des discours ambigus. L’utilisation du terme de substitution, au lieu de dérogation, s’apparente à un brouillage politique. Mesures de substitution = mesures de dérogations !
* La fausse promesse de l’État exemplaire !
Cet amendement ouvre une brèche à la possibilité d’élargir les demandes de dérogations à l’accessibilité, comme cela a déjà été démontré par le passé !
Le gouvernement s’était engagé à être un « État exemplaire » en termes d’accessibilité et voilà qu’on assiste à un retour en arrière, cédant aux lobbies des promoteurs du secteur touristique et hôtelier ! Pourquoi céder à cette ambition d’une France exemplaire, ce qui pouvait, par exemple, générer des effets positifs en termes d’accueil touristique d’une France qui vieillit !
Par ailleurs, le sujet de l’accessibilité universelle est bien déterminant pour l’inclusion des personnes en situation de handicap dans la société. Comment des considérations économiques et financières (qui restent encore à démontrer) peuvent-elles prendre le pas sur des considérations humaines et sociales ?
Le gouvernement et des parlementaires ne peuvent plus se permettre de faire des discours condescendants sur la situation des personnes à mobilité réduite alors qu’aucune politique de conception universelle et d’accessibilité universelle est impulsée et qu’ils essaient même de se soustraire à ces principes !
Une autre réalité est possible aujourd’hui et demain, une réalité qui va au-delà des paroles et qui se concrétise par des actes : une société ouverte à tous ! Des femmes et des hommes politiques de tout bord l’ont compris, un certain nombre de communes sont engagées dans ce sens, des promoteurs de logements et des professionnels du tourisme le démontrent aussi. Le gouvernement et les parlementaires, qui ont voté hier ces amendements, restent les seuls à ne pas l’avoir compris ! Malgré tous leurs discours de « bonne volonté » leur message est désormais inaudible pour les personnes en situation de handicap, leur famille et leurs proches !
L’APF réfléchit dès à présent à des initiatives nationales de mobilisation avec tous ceux concernés par une société ouverte à tous.
Le 17 février 2011.