VAL CENIS — Apparu en France dans les années 50 grâce à des passionnés, le handiski connaît un fort essor depuis deux ans. Les pratiquants handicapés rencontrés sur les pistes des Alpes évoquent un loisir procurant un "rare sentiment de liberté".
A Val Cenis, en Savoie, Vanessa Jahan, étudiante paraplégique, pratique le fauteuil-ski, ou uniski, depuis sept ans en cours particulier.
"Pendant le ski, il n'y a ni valide, ni invalide, tout le monde est pareil", explique cette Nantaise de 22 ans.
"En ski, je vois des regards d'admiration. Mais quand on revient en fauteuil, les regards changent", assure-t-elle, avant d'effectuer des virages réguliers.
Cette skieuse, qui suit une préparation physique un mois avant sa semaine de ski pour se muscler le haut du dos, est capable de prendre seule le télésiège, au prix d'une délicate acrobatie consistant à se pencher en avant pour asseoir son siège baquet.
Les difficultés de l'uniski? La prise de vitesse excessive et la poudreuse qui bloque les "stabilos", bâtons chaussés de petits skis permettant d'effectuer les virages, et déséquilibre la skieuse.
"Je leur apprends à utiliser le moins possible les stabilos pour éviter la fatigue des bras, en faisant davantage appel au transfert de force", explique sa monitrice, Emmanuelle Jorcin, membre de l'Ecole de ski internationale.
Pour les déficients visuels, la pratique du ski repose sur la "relation de confiance" avec leur pilote, assure Candide Codjo, non-voyant, président de l'Association sports et loisirs pour aveugles.
"La confiance se perçoit dans la voix du pilote. Si elle est rassurante, suffisamment sonore, le skieur marchera mieux que s'il entend une voix fluette qui ne le porte pas", précise cet accordeur de piano de 48 ans.
"Le skieur", positionné derrière son guide, "découvre la topographie du terrain au fur et à mesure qu'il descend. Son défi est d'analyser la nature de la neige en fonction du bruit des skis du guide", ajoute-t-il.
"Cela nécessite de la concentration, mais le ski alpin est l'un des rares sports permettant aux déficients visuels de s'autogérer complètement", assure-t-il.
Discipline olympique, "le handiski s'est développé" dans les années 50 "grâce à des bénévoles, ergothérapeutes, ou passionnés de ski qui voulaient partager leur plaisir", explique Jean-Marie Frichet, chargé de ski alpin à la Fédération handisport. Les Jeux paralympiques de Vancouver débutent le 12 mars.
"Ce sport a évolué très progressivement. Depuis deux ans, les stations ont fait de gros efforts accueillir les personnes handicapées", poursuit le responsable de cette fédération, qui commence juste à recenser ses pratiquants.
"Les écoles de ski ont bien joué le jeu en se procurant du matériel, car elles se rendaient compte qu'il s'agissait d'une grosse clientèle", souligne-t-il.
Aujourd'hui, la quasi-totalité des télésièges de 230 stations françaises est adaptée au handiski, grâce à l'évolution du matériel ainsi qu'à une loi de 2005 encadrant le secteur, qui vise une pleine accessibilité à horizon 2015.
Des efforts restent cependant à faire dans l'adaptation des structures d'accueil, d'hébergement ou de stationnement, selon M. Frichet.
"Il faut que les stations se rendent comptent que lorsqu'elles développent l'accessibilité aux handicapés, cela rend service à tout le monde, notamment aux personnes âgées", dit-il.
De Mié KOHIYAMA (AFP) – 14 févr. 2010